Shintoïsme & bouddhisme

Publié le par tokyoto2010.over-blog.com

La création légendaire du Japon et l'instauration de la lignée impériale sont indissolublement liés au shintoïsme ou shinto (神道), croyance de nature animiste et polythéiste. Dans le shintoïsme la nature est sacrée : une rivière, un rocher, un astre peuvent tenir lieu de divinités, l'homme n'étant qu'un élément du grand tout. Le panthéon shintoïste est peuplé d'une multitude d'êtres appelés kami () dont beaucoup ont forme humaine. Izanagi (イザナギ) et Izanami (イザナミ) sont les deux kamis qui ont présidé à la création du Japon en engendrant la déesse Amaterasu (天照) (« celle qui fait briller le ciel ») principale divinité du shintoïsme dont descendent tous les empereurs du Japon. Autres dieux célèbres du panthéon shintoïste : Inari ((稲荷神) dieu du riz et de la fertilité mais aussi gardien des maisons souvent symbolisé par un renard ; Hachiman (八幡神) le dieu guerrier ; Daikokuten (大黒天) divinité de la richesse et du commerce ; Ebisu (恵比寿) divinité des pêcheurs ; Benten (弁天) divinité du savoir, de la beauté et des arts ; et Bishamonten (毘沙門天) divinité des guerriers.

Le shintoïsme ne possède pas de textes sacrés mais sa mythologie est racontée dans deux livres fondamentaux datant du début du VIIIe siècle : le Kojiki (古事記) (« récit des choses anciennes ») et le Nihongi (日本紀) (« chroniques du Japon »). Il ne s'agit pas de textes « révélés » mais de chroniques qui relatent la généalogie de personnages divins ou humains depuis la création du pays.

Le lieu du culte shintoïste est le jinja (神社) ou jingu (神宮) (sanctuaire) où un ou plusieurs kami sont vénérés. Le sanctuaire est composé :

- d’un torii (鳥居), portique en général de couleur rouge à l’entrée du sanctuaire séparant le monde terrestre et le monde divin, le pur de l'impur.

- d'un bassin couvert appelé chozuya (手水舎) où les fidèles se lavent les mains et se rincent la bouche à l'aide d'une louche ou hishaku (柄杓) munie d'un long manche, afin de se présenter devant le kami exempts de toute souillure.

- d’un honden (本殿), bâtiment principal en bois surélevé par rapport au sol dont le toit est recouvert de chaume.

Le sanctuaire est gardé par une paire de Koma inu (狛犬), deux chiens à l’allure léonine placés sur un piédestal, se faisant face, l’un la gueule ouverte, l’autre fermée. On trouve aussi : des bâtiments annexes ; des offertoires où les croyants jettent de l’argent ; une cloche appelée Suzu () que les croyants font sonner à l'aide d'une corde pour avertir les divinités qu'ils sont venus prier ; un bâti sur lequel sont accrochées des plaquettes votives en bois appelées ema (絵馬) sur lesquelles les croyants écrivent un voeu afin qu'il soit lu par les kamis.

Dans les sanctuaires, de grosses cordes torsadées en paille de riz tressées de gauche à droite appelées shimenawa (標縄 ou 注連縄) délimitent des enceintes sacrées ou entourent des territoires de kami : rochers, arbres, etc. ; y sont souvent accrochés des gohei (御幣) objets dédiés aux kamis constitué de deux bandes de papiers blancs pliées en zig-zag. On voit également des croyants tirer au sort des omikuji (お神籤) divinations écrites sur des bandes de papier et prédisant la destinée ; si la prédiction est bonne le croyant garde avec lui le talisman, si elle est mauvaise, il l'accroche à un cadre conçu à cet effet, ou à un arbre, afin que les kamis contrarient la prédiction. Respect des traditions, harmonie familiale, respect de la nature et recherche de la paix sont les quatre principes de base de la religion shintoïste. Le croyant honore une ou plusieurs divinités qui lui sont propres et formule ses prières en fonction de ses préoccupations du moment, parfois très prosaïques : réussir un examen, donner naissance à un beau bébé, etc., essayant de s’attirer la bienveillance des kamis du bien et d’éloigner les démons.

Lorsqu'on visite les sanctuaires japonais où se pressent de nombreux fidèles jeunes et vieux en dévotion, on ne peut s'empêcher de s'étonner de voir cette religion primitive qui frôle la superstition demeurer vivace dans un pays aussi moderne que le Japon...

Le terme shinto est apparu au Japon pour différencier la principale religion du pays, du bouddhisme (仏教) importé progressivement de Chine et de Corée à partir du VIe siècle. La légende fixe son introduction à l'année 552 lorsqu'un souverain coréen envoya au souverain du Yamato une statue du Bouddha et des textes bouddhiques. L'importation du bouddhisme a été simultanée avec celle de l'écriture et a permis de donner un corpus de textes cités plus haut : Kojiki (古事記) et Nihongi (日本紀). En 592, le bouddhisme fut déclaré religion d'Etat par le prince Shotoku (聖徳太子) (574-622), sans pour autant faire disparaître le shintoïsme. Le shinto a en quelque sorte « digéré » le bouddhisme, adoptant de nombreuses divinités bouddhiques (le Bouddha lui-même fut considéré comme un kami), induisant ainsi une nouvelle forme de shinto : le ryobu-shinto. Du VIIIe au XVIIIe siècle, ce résultat du mélange des deux religions devient la religion officielle du Japon, le bouddhisme pur étant réservé à l'enseignement de quelques sectes.

Au VIIIe siècle, les six sectes bouddhistes qui s'établissent à Nara vont prendre une importance et un pouvoir considérable, le peuple demeurant à l'écart cette nouvelle confession. Pour contrer la montée en puissance des moines bouddhistes des sectes de Nara l'empereur Kammu (桓武天皇) (737-806) fait rapporter de Chine de nouvelles doctrines – Tendaï et Shingon – plus syncrétiques que les précédentes qui conduisent le bouddhisme à voir son pénétration augmenter dans les couches populaires. Ensuite, à l'époque Kamakura (1185-1333) – celle où peu à peu la classe des guerriers et les shoguns supplantent l'aristocratie et l'empereur – le bouddhisme zen arrive au Japon : secte Rinzai en 1191 et secte Soto en 1227.

 

A partir du XVIIIe siècle, le déclin du système féodal du shogunat et l'exaltation par les lettrés du passé shintoïste du Japon et du lien étroit unissant les divinités shintoïstes et l'empereur vont conduire le pays à renouer avec un shintoïsme « pur ». Le retour du pouvoir impérial à l'ère Meiji, en 1868, s'accompagne d'une interdiction du bouddhisme, le shintoïsme étant alors déclaré religion d'Etat. Mille ans de bouddhisme ne s'effacent pas d'un trait de plume : à partir de 1884, le pouvoir impérial se fait plus conciliant à l'égard du bouddhisme ; le shintoïsme devient la religion de la nation et l'expression de l'attachement des Japonais à leur pays, à ses traditions et à l'empereur.

En 2005, l'Agence pour les affaires culturelles du Ministère de l'éducation comptabilisait : 107 millions de shintoïstes (84 % de la population et...91 millions de bouddhistes (71 % de la population), preuve qu'un Japonais peut se dire et être à la fois shintoïste et bouddhiste, sans qu'il y ait contradiction. Les deux religions sont étroitement liées et partagent un grand nombre de rituels et de divinités. Le shintoïsme représente la religion de la vie et, comme il ne promet aucun au-delà après la mort, c'est vers le bouddhisme et ses perspectives de renaissance que se tournent les Japonais à l'approche de la vieillesse et de la mort. Un Japonais peut aller prier au sanctuaire shinto au nouvel an, s'y marier, et avoir des funérailles dans un temple bouddhiste.

Le calendrier japonais est jalonné de nombreuses cérémonies et fêtes très populaires, mêlant tradition shintoïste et rites bouddhistes, dont le sens parfois s'estompe mais qui sont vécues comme des occasions de se retrouver et de manifester sa joie. Ainsi, les matsuri (祭り/), fêtes souvent liées à une célébration religieuse dédiée à une divinité, ont lieu en général l'été dans de nombreuses villes ; on s'y retrouve en famille et entre amis pour participer à des processions, assister à des feux d'artifices, etc. Depuis plus de cinq cents ans, O-Bon (お盆) est une fête bouddhiste japonaise au cours de laquelle sont honorés les esprits des ancêtres et qui est l'occasion pour les familles de s'occuper des tombes de leurs ancêtres ; elle se déroule le 13 août.

Pour en savoir plus sur le bouddhisme [wikipedia]

Les temples bouddhistes sont appelés tera ou ji (). L'entrée du temple se fait par une porte de imposante ou mon () avec de chaque côté un niô (仁王) gardien au regard courroucé. Trois bâtiments essentiels constituent un temple bouddhiste japonais :

- le bâtiment principal ou kondo (金堂) (« salle d'or ») ou honden (本殿) (« palais principal ») ou butsuden (仏殿) (« palais de Bouddha ») dans le bouddhisme zen.

- la pagode ou to () de trois ou cinq étages, absente dans le zen.

- la salle d'études ou kodo (講堂) ou salle de dharma (法堂) dans le zen.

On peut également y trouver un « entrepôt de sûtras » ou kyozo (経蔵), un réfectoire ou jikido (食堂), une cuisine ou kuri (庫裡) et un dortoir ou sobo (僧房).

 

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